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Lutter contre l'habitus

Sur cette page vous trouverez les tentatives de venir briser l'habitus  


Pour s'étonner, s'interroger il est souvent utile (nécessaire?) de se repositionner. L'habitude et encore plus l'habitus sont bien nos ennemis les plus actifs pour nous empêcher de réaliser cette prouesse. Nous rentrons alors dans un cercle vicieux ou l'habitus nous bloque par divers mécanismes : les peurs (peur du changement, peur de pas être sociologiquement à sa place,...) et la paresse (facilité de l'acte connu, superstition de l'acte répété).

André Gide disait: "Le sage est celui qui s’étonne de tout. Mais encore faut-il qu'il y ait non pas matière à s'étonner, matière il y a toujours, mais "liberté" à s'étonner, car comme on peut facilement le comprendre "s'étonner" est subversif ? S'étonner c'est briser « cette sorte de soumission immédiate à l’ordre qui incline à faire de nécessité vertu, c’est-à-dire à refuser le refusé et à vouloir l’inévitable» [1]. S'étonner c'est remettre en cause l'ordre proposé.

Il s'agit donc par de nouvelles expériences d'élargir notre point de vue, de faire référence à de nouvelles sensations,  ... bref de devenir plus conscient de ce qui se passe et plus libre de penser par nous-même.

Étonnons-nous de tout ce qui change, jusqu'à pouvoir s'étonner de ce qui ne change pas.

Références
[1] Pierre BOURDIEU, Le sens pratique, Paris, Éditions de Minuit, 1980.
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Première expérience : Le "Jeu sans le Je" et le "Chut-Chapeau" 


Le Chut-Chapeau ici utilisé dans la chasse au "Je" Il est une première expérience dans cette volonté de modifier les codes pour mieux les comprendre.


La règle est simple le joueur qui prononce un "Je", est coiffé du Chut-Chapeau par le porteur précédent, il finit ensuite son intervention et ne peut plus intervenir dans la discussion tant qu'un autre joueur n'est pas sous le Chut-Chapeau.

Un autre objectif: parvenir à faire plusieurs choses en même temps ....

Dans cette expérience, nous allons devoir faire plusieurs choses en même temps : parler du fond, examiner la forme (on écoute en cherchant le "Je" dans le discours de l'autre) et surveiller son propre "Je" . 
C'est une expérience qui permet l'observation de la difficulté d'un contrôle conscient de notre propre discours.

Bilan 

La mise en place d'une dimension supplémentaire dans le débat n'est pas à considérer dans son apport positif ou négatif. En effet, que le débat en souffre ou au contraire qu'il en profite n'est pas notre but. Notre but est de faire vivre une (douce et amusante) "bousculade" intellectuelle.

Que le résultat soit positif ou négatif n'est donc pas une question qui permettrait de savoir si nous avons eu raison ou tort de faire ainsi. Cependant, cette expérience dans l'expérience (celle du club discussion) peut, elle aussi, être pourquoi pas évaluée en tant que telle (Mais sans que cela ne signifie qu'elle doive ou pas être renouvelée). C'est ce que nous nous proposons de faire ici.

Le fond du débat 

Le fond a peut-être souffert de cet ajout. Cependant, il est difficile de dire si cela est lié au fait que nous étions dans une suite (partie 2 de la différence entre l'amour et l'amitié) ou si  le jeu a réellement perturbé la qualité du débat. Ainsi les définitions que nous avons l'habitude de formuler dès le départ ont été plus ou moins oubliées et nous ont ensuite bien manquées. Est-ce parce que le "Jeu sans le Je" nous en a détourné ou parce qu'en tant que débat faisant suite (à la partie une) il ne nous a pas paru nécessaire de revenir sur une phase qui avait déjà été effectuée (mais qui aurait du être complétée).

La forme 

La forme a, par contre, elle pleinement profité de cet apport et le débat fut à la fois calme et très gai.





Conclusion

Les participants ont plus ou moins joué le jeu. Certains, pour éviter la première personne ont simplement parlé d'eux à la troisième personne.  D'autres ont utilisé des tournures impersonnelles. Mais nous avons tous dit "Je" et tous porté le Chut-Chapeau.
En nous faisant sauter du Jeu au débat et du Débat au Jeu, le Chapeau nous a sans doute déconcentré, mais aussi je l'espère déconcerté. Ceux qui avaient dit "Je" et se retrouvait tout d'un coup coiffé du chapeau sans s'être entendu prononcer le pronom avait vraiment l'air surpris.




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Deuxième expérimence : Psychodrame analytique de groupe à visée d'étude sociologique


Le mot peut faire peur. Notre idée est de permettre par l'improvisation et l'observation une meilleure compréhension de diverses situations. Cette démarche est effectivement très proche du psychodrame. Wikipédia nous reporte la définition suivante: "Selon le Dictionnaire International de la psychanalyse sous la direction d’Alain de Mijolla, Calmann-Lévy, 2002, il s'agit d'une « Méthode d’investigation des processus psychiques utilisant la mise en œuvre d’une dramatisation au moyen de scénarios improvisés mis en scène et joués par un groupe de participants. »"

Dans notre cas, la plus grande partie des participants sont observateurs et non acteurs, mais les rôles peuvent changer.  Nous nous trouvons alors dans le positionnement d'un "Psychodrame analytique de groupe". C'est cette approche nous avons utilisée pour faire émerger et caractériser une image du fumeur dans l'expérience du vendredi 25 avril 2014.

Mais personne n'est ici "patient". Les observateurs sont dans une démarche scientifiques d'évaluation de la situation et des postures. Les acteurs sont ceux qui vont porter à la connaissance de tous (par leur jeu d'acteur, les situations créées ou encore le vocabulaire choisi),  les caractéristiques d'un rapport entre eux (consciement ou inconsciement) et les objets ou sujets de l'improvisation. Le but n'est donc pas de soigner, mais de révéler une position, une vision. Les acteurs sont alors griots, compteurs, auteurs.
Pourquoi cette solution? Pourquoi ne pas s'appuyer sur la lecture d'un texte ou le visionnage d'un film et en faire ensuite classiquement l'analyse? 

Pour plusieurs raisons : 
  • Une première raison est liée à la liberté de mouvement des participants. Un texte ou un film demande un découpage temporel précis de la séance. On regarde le film ou on écoute le texte tous ensemble, puis ensuite on en parle. Dans notre cas, les participants peuvent rentrer et sortir quand ils le veulent. L'utilisation de scénettes de cinq minutes est alors particulièrement bien adaptée. Ils peuvent immédiatement effectuer les observations sur la scénette qui démarre juste après leur arrivé, sans avoir à être présents depuis le début. Il peuvent aussi sortir ensuite quand ils le désirent, sans gêner le déroulement de la séance.
  • La deuxième raison est l'efficacité de la "double interprétation". Jouer en improvisant une situation est une première façon de porter un jugement subjectif sur l'objet, ensuite le lire, l'analyser, le caractériser sont encore des opérations subjectives. Ces deux phases sont auto-amplificatrices de la subjectivité du groupe. Ainsi un acteur poussant son jeu sera d'autant mieux compris que le public est en accord sur les jugements et les pré-supposés proposés dans la scénette. Il s'agit donc d'un système qui se peut révélateur de ces pré-supposés que nous recherchons ici.
  • On trouve ensuite en vrac le désir et le plaisir des participants à jouer la comédie, la difficulté de passer un film dans une salle qui n'est pas complètement équipée et la liberté que l'exercice propose par la forme de l'improvisation, liberté qui est la valeur fondatrice du club. 

Bilan 

En terme de plaisir le bilan est très positif. Les participants sont enchantés et les demandes pour recommencer sont nombreuses.  Pour le reste il ne faut pas s'emballer ....

La forme de l'exercice 

Les participants ont montré des capacités d'improvisation impressionnantes.  
L'exercice de caractérisation et d'évaluation, bien que réexpliqué à chaque scène, pose lui des problème. Les problèmes sont liés à une méconnaissance du vocabulaire utilisé pour notifier les caractéristiques à évaluer et à une difficulté à l'évaluation elle-même (le participant "n'ose pas" poser une note d'évaluation).  Ces deux difficultés se renforcent et peuvent bloquer certains participants.

Cette forme pose aussi le problème de l'analyse des résultats. Il n'est pas possible d'effectuer dans un temps de séance (50 minutes) en plus des improvisations, le calcul des moyennes des notes et l'analyse des résultats. Le bilan s'est donc fait à l'oral sans tenir compte des résultats consolidés. C'est bien sûr un énorme problème : nous mettons en place une méthode d'évaluation et ne nous ne pouvons pas nous en servir (pour des problèmes de gestion du  temps) pour l'évaluation finale.
Bien sûr l'évaluation de chaque scénette par chaque participant va interagir avec les conclusions finales du groupe à l'oral. Les évaluations individuelles effectuées pendant l'observation des scenettes sont un support à la prise de recul individuelle. Il y a d'ailleurs une forte corrélation entre la conclusion bâtie oralement et le bilan faît à partir de l'analyse des chiffres. Mais  les évaluations ne sont plus qu'une aide individuelle pour chaque observateur.  
En ne publiant pas les résultats du groupe pour en faire ensemble l'analyse, nous n'avons pas mené la démarche "sociologique" jusqu'à son terme, puisque nous n'avons pas introduit les statistiques consolidées dans notre démarche d'analyse. 

Le fond

Le débat est resté centré sur l'axe de recherche. On peut en féliciter les participants, au vu des témoignages présents comme commentaires dans l'article du blog, rester centré sur la question de l'image du fumeur n'était pas toujours chose facile.

Conclusion

Une opération qui mérite d'être améliorée. L'utilisation de lettre (A, B, C, D, E) pour la notation pourrait simplifier l'opération de notation, plus grossière cette notation serait alors sans doute plus adaptée à codifier un sentiment et plus facile à manipuler.
L'utilisation des résultats consolidés (moyennes des notes et statistiques) pour conclure le débat reste la difficulté principale. Il est peut être possible de fortement limiter le nombre de paramètres évalués et ainsi de pouvoir les manipuler plus rapidement. Cependant, quand justement les paramètres essentiels ne sont pas parfaitement déterminés, en écarter certains devient dangereux pour la qualité de l'évaluation.

Nous sommes dans une forme de travail qui demande sans aucun doute un travail en trois ou même quatre temps:
  1. Création de liste de paramètres d'observation
  2. Mise en situation et observation
  3. Compilation des notes
  4. Analyse des résultats

La liste des paramètres a été dans cette expérience du vendredi 25 avril 2014, proposée par l'animateur et l'analyse des résultats simplement "survolée" sur le site web. Nous pensons quand même que si les participants lisent le compte rendu de l'expérience sur le site, une grande partie de la démarche sera alors respectée.
La consultation du blog est présenté à chaque séance comme un complément important de l'activité. Est-ce suffisant?